Modélisation

Modélisation de la croissance du colza (Brassica napus L.) sous contrainte N et S

Responsable de la thématique: S. Brunel-Muguet

1. Objectifs de l’approche de modélisation

La construction d’un modèle écophysiologique doit permettre de structurer et synthétiser des observations et connaissances sur les mécanismes et processus majeurs qui contrôlent la réponse de la plante en conditions limitantes et non limitantes en N et S. Au-delà de son intérêt cognitif, le modèle écophysiologique envisagé vise à prédire des sorties d’intérêt agronomique (« crop model »), tels que l’accroissement, au cours de la durée du cycle de culture, de la surface foliaire, de la biomasse des différents organes et du prélèvement de N et de S.

En parallèle à ce travail, des caractérisations biochimiques et moléculaires sont envisagées afin d’identifier des indicateurs de croissance sous contrainte NS. Ces caractérisations permettront d’introduire des échelles d’analyses plus fines pour (i) construire un modèle de flux C, N et S (prélèvement, assimilation, utilisation, remobilisation) entre organes et (ii) construire des modèles stœchiométriques permettant de hiérarchiser les voies réactionnelles impliquée dans la réponse à la contrainte nutritionnelle  (e.g. flux global en N ou S, enzymes, intermédiaires réactionnels).

2. Construction du modèle écophysiologique explicitant l’offre et la demande en C, N et S

La construction du modèle écophysiologique intégrant les interactions N & S est séquentielle afin d’analyser séparément les effets d’une limitation en S et en N, puis les effets couplés d’une limitation NxS. La comparaison des formalismes acquis lors de la première étape doit permettre d’aborder le modèle d’interactions NxS avec des hypothèses sur les lois de répartition CNS au sein de la plante.

  •  Etablissement de lois de réponse de la croissance foliaire à l’échelle de la plante entière

Dans un premier temps, la dynamique de croissance foliaire sert de point d’entrée à la prédiction de la biomasse et à la répartition en N et S entre les différents organes. Les relations pilotant les sorties du modèle au cours de la phase végétative sont fondées sur la dynamique des relations explicitant l’offre et la demande en C, N et S, telles que proposées dans d’autres modèles intégrant les effets du N (Brisson et al., 1998; Jamieson et Semenov, 2000) ou du P (Mollier et al., 2008) sur la croissance dynamique au cours du cycle de culture.

Ces relations « classiques » seront adaptées aux caractéristiques architecturales du colza et aux particularités des métabolismes N et S. Ainsi formalisées, elles permettront par ailleurs d’introduire des variables intégratives de type efficiences i.e. prélèvement (NUpE, SUpE), assimilation du C de type Monteith (RUE), remobilisation (NRE, SRE) et utilisation (NUtE, SUtE).

D’un point de vue expérimental, la construction de ce modèle se base sur les lois de réponses aux facteurs environnementaux considérés: température, rayonnement (ou PAR), disponibilité en N et S. La croissance dynamique simulée est contrainte par le facteur le plus limitant à chaque pas de temps («loi du minimum»).

  •  Vers un modèle de répartition explicitant la dynamique des forces de puits des organes reproducteurs

Les premiers résultats mettent en évidence l’importance des forces de puits des différents organes et incitent à affiner le degré de compartimentation (strates, ordres de ramification). Aussi, afin d’intégrer de façon plus fine l’effet de la composante structurale sur la répartition de la biomasse et des quantités de N et S en allant jusqu’à la prédiction des composantes de rendement, il sera envisagé d’adapter des modèles structure-fonction permettant de prédire la répartition de biomasse, du N et S en fonction de variations locales de l’environnement et in planta (De Reffye, 2006 ; Bertheloot et al. 2008, 2011).

3. Vers l’intégration du contrôle génétique des caractères phénologiques impactant la croissance

Dans ce modèle d’interactions NxS, les variables d’entrée « plante » sont dépendantes à la fois du génotype et de l’environnement. L’intérêt d’établir des lois de réponses de ces variables aux facteurs environnementaux est d’accéder à des paramètres ou coefficients génétiques dont les valeurs ne seront plus dépendantes que du génotype.

A l’issue du travail de modélisation, des analyses de sensibilité seront envisagées afin de cibler les caractères sous-jacents aux paramètres « plante » qui ont le plus d’effets sur les valeurs des sorties. Cette étape doit permettre d’identifier des génotypes contrastés pour ces caractères et d’envisager une approche de cartographie de QTL par le phénotypage d’une population en ségrégation disponible et pertinente quant aux critères de variabilités recherchés sur ces paramètres.

L’analyse permettra (i) d’identifier des QTL à l’origine des variations phénotypiques observées sur ces paramètres, puis (ii) de cibler in silico les gènes susceptibles d’interférer dans l’expression de processus métaboliques majeurs à l’origine des variations des paramètres « plantes ». Les caractérisations moléculaires acquises par l’équipe devront permettre de bâtir des hypothèses physiologiques et de cibler les gènes candidats. L’intérêt majeur d’une telle approche est de pouvoir développer une approche « gene-to-phenotype » (Quilot et al., 2005 ; Chenu et al., 2009) permettant de combiner le modèle génétique (issu des analyses QTL) au modèle écophysiologique. Il sera alors possible de créer des idéotypes en associant des valeurs de paramètres calculées par combinaison linéaire des effets des QTL détectés. Cette approche destinée à développer des outils de sélection assistée par marqueurs semble prometteuse pour maintenir voire améliorer les performances agronomiques dans un contexte de réduction de la fertilisation N et S (voir Figure).

Modification date : 04 November 2023 | Publication date : 09 March 2012 | Redactor : J. Trouverie