Variabilité de l’efficacité alimentaire chez le porc : le rôle clé des métabolismes énergétiques tissulaires

Améliorer l’efficacité alimentaire pour réduire la part des dépenses alimentaires dans le coût de production et les rejets dans l’environnement, et contribuer ainsi à la durabilité des systèmes de production de viande.

Étude de deux lignées de porcs pour comprendre les variations d’efficacité alimentaire des animaux

L’amélioration de l’efficience alimentaire est aujourd’hui l’un des principaux objectifs de la filière porcine. Elle vise à réduire la part des dépenses alimentaires dans le coût de production des porcs et les rejets dans l’environnement, et contribuer ainsi à l’optimisation et à la durabilité des systèmes de production de viande. Une expérience de sélection divergente sur la consommation moyenne journalière résiduelle (CMJR), un estimateur de l’efficacité alimentaire, a été mise en place à l’Inra afin de disposer de modèles animaux pertinents pour analyser les bases génétiques, physiologiques, et comportementales des variations d’efficience productive des porcs.

Augmentation des métabolismes énergétiques aux niveaux musculaires et hépatiques

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Nos travaux montrent que les porcs à CMJR élevée (CMJR+, c’est-à-dire les moins efficaces) sont plus gras, leur viande est plus riche en lipides, et de meilleure qualité technologique du fait d’une plus faible teneur en glycogène musculaire. Les  métabolismes glycolytiques et oxydatifs musculaires sont plus élevés chez les porcs CMJR+, suggérant une utilisation accrue des substrats glucidiques et lipidiques au niveau cellulaire pour les porcs les moins efficaces. Cette stimulation globale du métabolisme énergétique musculaire s’accompagne d’une augmentation de l’activité de l’AMPK (AMP-activated protein kinase), un senseur du déficit énergétique cellulaire connu pour stimuler le catabolisme simultané des substrats glucidiques et lipidiques dans le muscle. Dans le foie, une augmentation du potentiel d’oxydation des acides gras et de l’activité néoglucogénique est également observée chez les porcs à CMJR élevée. Cette augmentation globale des métabolismes énergétiques aux niveaux musculaires et hépatiques pourrait être associée à une accélération des cycles de nutriments entre organes, à l’origine d’une déperdition de l’énergie cellulaire et donc d’une moindre efficience de l’animal.

Effets génétiques ou comportementaux ?

Pour distinguer la part des effets génétiques dans cette accélération métabolique de celle consécutive aux différences de comportement alimentaire entre lignées, les apports alimentaires des porcs sélectionnés pour une CMJR élevée ont été réduits au niveau de l’ingestion spontanée des porcs à faible CMJR (CMJR-). Les réponses métaboliques dans le foie apparaissent plus strictement liées au processus de sélection génétique, alors qu’au niveau musculaire, elles sont plutôt associées à la différence induite de consommation alimentaire.

Paramètres d’études complémentaires pour des animaux efficaces

L’augmentation des niveaux d’activités des métabolismes cellulaires est clairement associée à une moindre efficacité alimentaire chez le porc. L’implication de la voie AMPK dans la régulation des métabolismes et son rôle dans les variations d’efficacité alimentaire à l’échelle de l’animal puis dans la variation des qualités technologiques des viandes ont été confirmées en réponse à des contraintes d’élevage comme la température ambiante. Les études se poursuivent notamment en relation avec le régime alimentaire. La hiérarchie et les interactions entre les acteurs cellulaires les plus impliqués font aussi l’objet d’études mécanistiques in vitro sur cultures de cellules.

En savoir plus

Ces travaux, financés par le programme ANR PigFeed, ont contribué à la réalisation de deux thèses soutenues en 2013 (Justine Faure et Thierry Le Naou). Ils ont donné lieu à plusieurs publications et communications en conférences dont :

Le Naou T., N. Le Floc’h, I. Louveau, H. Gilbert, F. Gondret. 2012. Metabolic changes and tissue responses to selection on residual feed intake in growing pigs. J. Anim. Sci. 90: 4771-4780. (DOI)

Faure J., L. Lefaucheur, N. Bonhomme, P. Ecolan, K. Meteau, S. Metayer Coustard, M. Kouba, H. Gilbert, B. Lebret. 2013. Consequences of divergent selection for residual feed intake in pigs on muscle energy metabolism and meat quality. Meat Sci. 93: 37-45. (DOI)

Louveau I., A. Vincent, F. Gondret, H. Gilbert, L. Lefaucheur. 2013. Divergent selection on residual feed intake influences gene and protein expressions in pig muscle. In: Book of abstract of the 64th annual meeting of the EAAP, p. 590. Wageningen Academic Publishers. [lien]

Contact

Louis Lefaucheur, équipe physiologie et métabolismes de la croissance (louis.lefaucheur[at]rennes.inra.fr).

Date de modification : 07 février 2023 | Date de création : 22 décembre 2014 | Rédaction : PEGASE