Réduire l’impact environmental de la production porcine en ajoutant des acides aminés aux aliments des animaux

Quantifier, par analyse du cycle de vie, le potentiel d’atténuation des impacts environnementaux selon différents scénarios d’incorporation d’acides aminés dans les aliments du porc, le nombre d’aliments en engraissement, la gestion des effluents et la formulation des aliments dans une ferme conventionnelle en France.

Améliorer l’efficience du système et les résultats d’impacts environnementaux

Les systèmes de production porcins contribuent à la pollution de l’air, des sols et des eaux, en relation avec l’élevage intensif et l’utilisation de matières premières alimentaires riches en énergie et en protéines. Ces systèmes reposent sur des intrants tels que le tourteau de soja, qui est principalement importé du Brésil et peut être associé à la déforestation. Le contenu en azote des effluents, les émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote pendant le stockage, le traitement et l’épandage sont associés à l’excrétion d’azote dans les urines et les fèces.
Nourrir des porcs à l’engrais avec des régimes à teneur abaissée en protéines, équilibrés en acides aminés (AA) grâce à l’utilisation d’acides aminés industriels, réduit l’excrétion d’azote sans modifier les performances des animaux.

Notre objectif était de quantifier le potentiel d’atténuation des impacts environnementaux selon différents scénarios d’incorporation des acides aminés dans les aliments, en considérant toutes les catégories d’animaux en élevage naisseur-engraisseur.

Porc

Des pratiques d’alimentation réduisant les apports protéiques de la ration

La formulation des aliments à moindre coût, avec incorporation des AA et teneurs en protéines libres permet de réduire nettement les teneurs en protéines des aliments de toutes les catégories d’animaux, quel que soit le plan d’alimentation des porcs à l’engrais.  Dans le même temps, l’incorporation de tourteau de soja des aliments est divisée par trois ou quatre et remplacée par une incorporation accrue de céréales et d’AA. Il s’ensuit une réduction substantielle du coût des aliments.
Les impacts de la production du kilogramme de porc vif sur le changement climatique, l’acidification et l’eutrophisation diminuent avec l’augmentation du taux d’incorporation des acides aminés industriels. La réduction maximale (vs. scénario sans AA) d’impact est de 12% à 30% pour le changement climatique, de 33% à 37% pour l’acidification, et de 25% à 28% pour l’eutrophisation. Les impacts de la production sur la demande en énergie, l’écotoxicité terrestre et l’occupation des surfaces se sont avérés peu sensibles aux scénarios étudiés. Dans les systèmes lisiers, la réduction des impacts est surtout associée à la réduction des impacts de la production des aliments, tandis que pour les systèmes fumiers, les améliorations portent surtout sur l’élevage en bâtiment et la gestion des effluents.

Nos résultats ont démontré que les régimes à teneurs les plus faibles en protéines, formulés avec non seulement des apports de lysine, thréonine, méthionine mais aussi tryptophane et valine, sont les plus efficaces pour réduire les impacts changement climatique, acidification et eutrophisation.
Associée à une alimentation multiphase des porcs à l’engrais, l’incorporation d’AA avec teneur libre en protéines permet d’atteindre la réduction maximale des impacts.

L’analyse de sensibilité réalisée a par ailleurs montré la robustesse de ces résultats quels que soient le contexte de prix des matières premières. D’une manière générale, les pratiques visant à ajuster les apports en nutriments aux besoins des animaux, en dynamique, améliorent l’efficience du système et les résultats d’impacts.

Réduire les impacts mais aussi les coûts d’alimentation

La mise en place d’une alimentation reposant sur une formulation des aliments à moindre coût, avec apports d’AA et pas de limite inférieure des teneurs en protéines, associée à une alimentation multiphase des porcs à l’engrais, pourrait permettre une réduction substantielle des impacts, en particulier sur l’eutrophisation, l’acidification et le changement climatique qui sont des impacts particulièrement préoccupants dans le bassin de production breton. Cette pratique apparaît comme une stratégie gagnant-gagnant puisqu’elle permet de réduire plusieurs impacts, sans en augmenter d’autres, tout en réduisant les coûts d’alimentation.

Cette étude a été valorisée dans les travaux d’estimation du potentiel d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre du secteur Agriculture à l’horizon 2030 en France (« Quelle contribution de l’agriculture française à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ? Potentiel d’action et coût de 10 dix actions techniques »).

Références bibliographiques

  • Garcia-Launay F., van der Werf H.M.G., Nguyen T.T.H., Le Tutour L. and Dourmad J.Y. 2014. Evaluation of the environmental implications of the use of amino acids in pig production using Life Cycle Assessment. Livestock Science 161: 158-175. (DOI)
  • Garcia-Launay F., Dourmad J.Y., Faverdin P., Espagnol S. 2014. Réduire les émissions de gaz à effets de serre des élevages porcins en diminuant les apports protéiques: stratégies et perspectives. Innovations Agronomiques 37: 39-52. [lien]
  • Pellerin S., Bamière L., Angers D., Béline F., Benoît M., Butault J.P., Chenu C., Colnenne-David C., De Cara S., Delame N., Doreau M., Dupraz P., Faverdin P., Garcia-Launay F., Hassouna M., Hénault C., Jeuffroy M.H., Klumpp K., Metay A., Moran D., Recous S., Samson E., Savini I., Pardon L., 2013. Quelle contribution de l’agriculture française à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ? Potentiel d'atténuation et coût de dix actions techniques. Synthèse du rapport d'étude, Inra (France), 92 p. [lien]

Contact

Florence Garcia-Launay (florence.garcia-launay[at]rennes.inra.fr)

Date de modification : 07 février 2023 | Date de création : 24 novembre 2015 | Rédaction : Pegase