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La biologie de l'évolution et du développement vise à comprendre les variations ontogénétiques qui conduisent aux variations morphologiques observées entre espèces. Mais ces variations peuvent-elles se produire très précocement, dans l’œuf ?

Le développement animal est initialement contrôlé par des facteurs maternels déposés pendant l’ovogenèse. Ces composants maternels dirigent entièrement les premières étapes embryonnaires avant la transition maternelle-zygotique, y compris la formation des axes embryonnaires et de l’organisateur dorsal. Ici, nous explorerons la contribution de ces facteurs maternels à l'évolution phénotypique d'un poisson cavernicole aveugle.

Nous tirerons parti des deux morphes de l'espèce Astyanax mexicanus, qui ont divergé très récemment et sont interfertiles, pour innover dans le domaine et comprendre « l’évolution en action ». Nous explorerons le contrôle maternel de la perte totale des yeux et des compensations sensorielles qui ont accompagné l’évolution des Astyanax cavernicoles en absence de lumière. Nous proposons une approche multi-échelle par biologie comparée des systèmes pour caractériser l'évolution de la contribution maternelle chez le morphe cavernicole (but1), pour comprendre ses conséquences morphogénétiques (but2), et pour décrypter ses origines (but3).

1. Nous caractériserons les gènes à effet maternel qui sont impliqués dans les variations de l’embryogénèse précoce, y compris la formation de l’organisateur, entre embryons de surface et embryons cavernicoles, et nous en identifierons les causes génétiques dans les régions régulatrices du génome.

2. Nous décrypterons comment de telles variations dans le contrôle maternel des premières étapes du développement peuvent se traduire en variations morphogénétiques lors de la gastrulation et de la neurulation. Nous focaliserons notre attention sur des tissus d’intérêt spécifique (organisateur, plaque préchordale, plaque neurale antérieure) et nous déterminerons les différences dans les signatures et trajectoires transcriptomiques cellulaires et les comportements cellulaires susceptibles d’impacter les phénotypes cavernicoles. 

3. Nous établirons un portrait moléculaire comparé de l’ovogénèse chez les poissons cavernicoles et leurs conspécifiques de surface pour comprendre les origines de la régulation de l’expression des gènes maternels dans la gonade de la mère.

En somme, nous posons la question de savoir si l’évolution phénotypique peut trouver ses origines dans des évènements développementaux ultra-précoces, avant même la fécondation, pendant l’assemblage de l’œuf dans la gonade maternelle. CAVEMOM est la première étude sur le rôle et l'impact de la composante maternelle ultra-précoce dans l'évolution morphologique.

Notre consortium est composé de groupes de renommée mondiale dans les disciplines de la biologie du développement et de l’évolution, la neurobiologie du développement et la biologie de la reproduction des poissons. Nous maitrisons les méthodologies utilisées, et collaborons avec des plateformes de haut niveau (séquençage, bio-informatique, édition de génome, imagerie). Les tâches proposées et nos hypothèses reposent sur des résultats préliminaires et publiés solides et originaux. Les avancées du projet se traduiront de façon originale en actions de vulgarisation et d’enseignement.

Ce projet est coordonné par Sylvie Rétaux (CNRS). Julien Bobe participe au projet